À la voile...

À la voile...
Sur notre CS-22 au réservoir Taureau

lundi 16 août 2010

Moins 2 ou moins 3 pieds sous la quille...



15 août 2010


Je suis donc arrivé au Club Nautique de l’Île Bacchus, à St-Laurent Île d’Orléans, un peu après 22 :30 heure. 10 1/2 de longue navigation à moteur. Arrivé de noirceur, deux gaillards attrapent mes amarres. Un solitaire au port n’est jamais vraiment solitaire, à moins qu’il ne le souhaite. Dans le bassin peu avant d’accoster, par pur réflexe, je regarde le profondimètre et note mentalement le chiffre que j’y vois.

Pour revenir à ces des messieurs m’ayant accueilli sur le ponton, figurez-vous donc qu’ils avaient un petit verre dans le nez… Il fait beau, c’est samedi soir et c’est la fête sur les pontons. Faut pas les blâmer, ils devaient absolument boire quelque chose par cette chaleur… D’un sujet à l’autre, ils se retrouvent à l’intérieur du voilier pour une visite guidée. Nous discutons pendant plus d’une heure. Messieurs, je suis parti de Cap-à-l’Aigle à midi aujourd’hui. Je suis crevé, est-ce que je peux aller me coucher??? Vite au lit, il est presque minuit.

Ça fait pas 2 minutes que je me suis installé pour dormir que, je me rappelle soudain le chiffre de la profondeur juste avant l’accostage. 23 pieds que l’afficheur digital disait. Si j’y soustrais le marnage de la prochaine marée, ça me donne la profondeur restant dans le bassin à mer basse… Il faut qu’il reste au minimum 5’10’’, sinon ma quille accote au fond… Au fait c’est combien le marnage de la prochaine marée? Euh! Je sais pas! Mais, je n’ai pas envie de me lever qu’il me dit. Ouais mais, si ta quille se dépose sur un fond dur et que la marée continue de descendre… En plus, tu as la profondeur dans le bassin avant de t’amarrer mais quelle est celle au quai, sous ton voilier présentement? Euh! Deuxième je sais pas! Et Chantal qui ne serait pas contente si tu abîmais SON bateau. L’argument-matraque. Celui contre lequel toute parade est purement vaine. Bon, bon, je me lève, le jusant a débuté il y a environ, disons, environ 2 heures et le profondimètre indique 17.3 pieds. Sur une marée d’au plus 20 pieds, il devrait y en avoir le quart de descendu, c’est-à-dire 5 pieds. Il resterais donc encore 15 pieds à descendre ce qui fait… un modique 2.3 pieds. 3 1/2 de moins que mon tirant d’eau…Ai-je été trop généreux en estimant le marnage de 20 pieds? Je l’espère… Mais je sais aussi que nous sommes en périodes de grandes marées et l’amplitude de celle cette nuit est de 16’10’’, Si on y soustrait 1/4*16’10’’ = 12’7’ encore à descendre. Tout le monde me suit??? Pas grave, l’important c’est que ça veut dire qu’il resterait 4’5’’ à mer basse. C’est moins que mon tirant d’eau ça! Si c’est un fond de vase molle comme à peu près partout le long du fleuve, ce n’est pas grave mais, si c’est un fond de roches… À l’heure qu’il est, personne connaissant l’endroit n’est disponible. Je retourne me coucher en me disant que s’il se passe quelque chose d’anormal, mon sens marin me réveillera.

C’est ce qu’il fit à 5 :16 très exactement. Je ne sais pas quoi mais quelque chose ne tourne pas rond. J’enfile mon short, je sors sur les quais. À part qu’il est tout à fait immobile, mon voilier semble correct. Les amarres ne sont pas tendues à vouloir rompre, le voilier est toujours dans son assiette. Mais s’il ne bouge pas, est-ce que ça signifie qu’il est assis sur sa quille? Le profondimètre indique 5 pieds. Euh…la quille est au fond… Bon, il reste encore environ une demi-heure de jusant, ce qui veut dire peut-être 6 pouces à descendre. Comme pour confirmer ce constat, un craquement provenant des entrailles de Lady Marianne se fait entendre. Rien de sinistre mais, juste pour laisser savoir que ça force un peu. Incapable de me recoucher, j’arpente le ponton, vérifie l’assiette, la tension des amarres. À part de légers craquements de temps en temps, tout laisserait croire que la situation est normale, que je m’inquiète inutilement. Le minimum auquel le profondimètre est descendu est 4’5’’. La quille était indubitablement envasée. Et lorsque la marée remontera un léger bruit de succion se fera entendre, accompagné de quelques bulles apparues à la surface de l’eau brunâtre, lorsque la quille se libérera.

À l’heure prévue de l’appareillage, 7 :00, je largues les amarres et embraye le moteur tout doucement pour ne pas réveiller personne. Avant d’atteindre le brise-lame, un fort bruit de cloche digitale se fait entendre et on annonce dans les haut-parleurs : « Le Lady Marianne, revenez au ponton SVP. Lady Marianne, Lady Marianne. » Je fais signe que j’ai entendu mais, m’étant déjà engagé dans le chenal de sortie, je dois aller me retourner à l’extérieur du bassin et revenir sur mes pas. J’effectue la manœuvre et reviens m’accoster. J’ai tenté de fuir comme un voleur mais je me suis fait prendre. Sincèrement, je ne croyais pas que quelqu’un serait à la capitainerie à cette heure. Le gentil petit monsieur me dit qu’il est à son poste à partir de 6 :30 heure tous les matins et que ça me coûte la modique somme de $58 pour la nuit, simplement pour avoir attaché 3 amarres à des taquets pour environ 8 heures. Je tente d’expliquer mon arrivée tardive, mon départ hâtif pour rejoindre Portneuf tout en étant totalement dépendant de l’horaire des marées. On parle bateau, il passe ma carte Visa dans la machine et je me sens soudainement plus léger de $58. Deuxième appareillage à 7 :20 heure.





Derrière la pointe de Lévis à 8 :15 heure, la majestueuse Québec, trônant sur son Cap Diamant, m’est apparue. Jamais je ne me lasserai de ce point de vue unique. Ah! Québec! Québec la belle au charme irrésistible. On se reverra une prochaine fois car aujourd’hui, je dois passer mon tour. J’ai plutôt mis le cap sur Portneuf. Non pas que je la préfère à toi, loin de moi ce sentiment. Mais comprends-moi, je dois retrouver ma douce, elle m’attend à quelques trois jours de toi. Nous reviendrons ensemble pendre de longues marches sur tes trottoirs, sentir les odeurs de ton marché et admirer ta simple beauté. Vous ai-je déjà dit que j’aime Québec???

Finalement, je rallierai Portneuf à 12 :30 heures après une petite navigation sans histoires à moteur. Plus que 2 journées de navigation pour rejoindre Berhierville… Toutefois, je crains de devoir passer 2 nuits à Portneuf car la météo n’annonce rien de bon pour un marin solitaire. Orages accompagnés de rafales à 50 noeuds, veille de grain, non vraiment, rien de bon…

Robert

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